Il y a tellement de nuages que la lueur blafarde de la lune a du mal à éclairer la terre. La pluie tombe avec violence. Aurore a peur et tremble comme une feuille, d'autant qu'en plus des voix abominables, les ululements des chouettes se font entendre à proximité. Elle est très fatiguée. Heureusement, ses compagnons trouvent un grand chêne protecteur qui les accueille pour la nuit en leur disant "Soyez les bienvenus, que votre sommeil soit paisible et réparateur". Son large et puissant feuillage les protège de la pluie. Aurore se tapit tout contre le tronc rugueux du grand chêne et pose sa tête sur la mousse qui la pénètre de son odeur à la fois vivifiante et calmante et elle s'endort immédiatement. Cette nuit-là Aurore fait plein de rêves...

Au matin, les premiers rayons du soleil levant et le chant des oiseaux réveillent la petite fille.Sur sa poitrine est posé un mignon rouge-gorge qui l'observe d'un oeil vif et coquin.

 

Angèle et Thimothée lui apportent un déjeuner frugal de myrtilles et de fraises des bois ainsi qu'un peu de rosée céleste recueillie dans une feuille soigneusement pliée. Ces baies et fruits sauvages glissent fraîchement sur sa petite langue : c'est comme un repas de fête qu'elle partage dans la joie avec ses compagnons. Emoustillée par l'odeur de l'herbe mouillée, Aurore se met à danser pieds nus sur la terre nourricière, en faisant bien attention de n'écraser ni fourmi ni autres insectes.

Soudain un léger clapotis les attire non loin du lieu où ils se trouvent, intrigués, ils rassemblent leurs
affaires et reprennent leur route vers le murmure cristallin et découvrent au détour du chemin une rivière transparente. Sur le bord, une barque semble les attendre. Ils s'y glissent et la voilà qui démarre toute seule, comme par enchantement et remonte la rivière. De nombreux nénuphars fleuris, dans les tons de rose pâle, s'épanouissent et pointillent la surface. Le paysage est magnifique, des oiseaux de mille couleurs viennent leur faire la fête. Aurore ressent un bien-être parfait au milieu de cette nature luxuriante, elle plonge sa main dans l'eau claire, dessinant un sillon, interrompu, lorsqu'elle rencontre quelques grenouilles sauteuses qui la chatouillent.... Après une bonne heure de remontée, ils arrivent à la source, et quittent l'embarcation en suivant un petit sentier moussu qui les conduit derrière une cascade. Là, à leur grand étonnement, ils découvrent un mystérieux laboratoire rempli de récipients en verre aux formes étranges : des liquides de toutes les couleurs bouillonnent en émettant des bruits bizarres...

Un vieil homme vêtu d'une longue robe en velours couleur bleu nuit parsemée d'étoiles dorées, son visage encadré d'une longue barbe blanche piquée de pâquerettes, les yeux cerclés d'or et la tête surmontée d'un chapeau pointu est assis devant une table en train de lire un manuscrit très ancien à l'odeur de poussière.
 
 



Il se frotte souvent le menton, lève les yeux au ciel, soupire et finalement pousse un cri de joie en bondissant comme un jeune homme : il vient de découvrir la formule magique qu'il cherchait depuis si longtemps.

Il était si absorbé et concentré, qu'il n'avait pas entendu ni vu arriver la petite fille et ses amis, maintenant, cachés derrière un gros alambic qui le regardent avec de grands yeux, sauter, et danser, et bondir sur place, et pirouetter, et voltiger d'allégresse. Soudain ses pieds s'emmêlant dans son large manteau, il fait un vol plané gracieux et atterrit aux pieds d'Aurore, un sourire géant lui mangeant son visage, il lui dit alors : "Bonjour, petite fille, je t'attendais"

Aurore n'est plus surprise de ce qui lui arrive et confiante, elle s'approche du magicien qui lui propose de s'asseoir afin qu'il puisse lui raconter son histoire. Il s'agit de l'histoire du dragon AGIO qui sème la terreur partout où il passe, brûlant tout sur son passage, enlevant des enfants pour les manger.. Personne n'a jamais pu le terrasser. Aurore est la seule qui a le pouvoir de l'endormir pour l'éternité. Pour cela elle devra l'approcher tout près, dominer sa peur, s'agenouiller et en le regardant droit dans les yeux prononcer la formule magique que le magicien vient enfin de découvrir après tant et tant d'années de recherche. Après avoir écouté cette extraordinaire mais néanmoins très inquiétante histoire, Aurore se remet immédiatement en route en suivant les indications du vieil homme pour arriver jusqu'à la caverne d'AGIO. Aurore tient toujours le bouquet de fleurs, qui miraculeusement n'est pas encore fané et qui embaume merveilleusement, et elle en ramasse encore d'autres dès qu'elle en voit : " je suis le COURAGE " dit le dahlia, " l'ESPERANCE " dit le perce-neige... son bouquet est maintenant si grand qu'elle commence à avoir du mal à le porter.

 

 

 

 


Après une journée de marche sous un soleil de plomb les trois compagnons arrivent en vue du territoire du terrible dragon. C'est un endroit désertique, et creusée dans la roche, apparaît enfin la caverne, la fameuse caverne !... Une odeur pestilentielle s'en dégage qui fait reculer d'horreur nos trois amis. Soudain la terre se met à trembler fortement et le vent se déchaîne. L'affreux dragon n'est plus loin. Le coeur d'Aurore bat fort dans sa poitrine et ses mains se mettent à trembler. Elle reste comme clouée sur place alors que le bruit insoutenable se rapproche, les arbustes s'enflamment les uns après les autres et voilà qu'elle se trouve nez à nez avec le monstre sortant de son antre. La peur la paralyse , elle a envie de s'enfuir très loin et de se cacher loin du monstre et de son odeur nauséabonde. Agio se met alors à pousser des hurlements et à cracher du feu. Alors la petite Aurore se met à genoux et malgré sa peur, les mains dans une attitude de prière elle prononce la formule qu'elle a apprise par coeur : " Du Nord au Sud, d'Est en Ouest, que tous les éléments du végétal, minéral, animal et mental se regroupent en moi en un feu sacré, libérateur et purificateur ". Le résultat est instantané : une force miraculeuse balaye le monstre qui s'affaisse de tout son long en poussant un long cri de désespoir et s'endort d'un sommeil éternel. Plus jamais, il ne fera de mal.
 
 

Page 3
 

Home Page